samedi 14 septembre 2013

Opéra de Vichy Journées du patrimoine 2013

N'allons pas bien loin et à quelques pas de chez moi, je suis parti à la découverte de ce très beau théâtre...


Bel exemplaire d'architecture Art Nouveau, ce théâtre a été inauguré en 1901. Extension du Casino, il peut accueillir près de 1400 personnes.
Décoré par Rudnicki, il utilise tous les éléments floraux chers à ce mouvement artistique.

Ferronnerie d'entrée
Dessin mural
 Arbres, fleurs épanouies et éléments dans les tons de bronze viennent ponctuer des gypseries pâles. C'est tout l’éclectisme goûté par le public de l'époque qui se retrouve dans la salle de spectacle où Sarah Bernhardt partagera la vedette avec d'autres comédiens qui feront les beaux jours des saisons de l'Avant-Guerre.



Un  beau moment dans un endroit qui fait voyager dans le temps.

Littérature et estampe 2 Japon amoureux

Contes d'Ise et Ariwara no Narihira

Chikanobu, brocarts de l'Est
Poète du IX° siècle et figure des Six Poètes Immortels, Ariwara no Narihira est le pendant masculin d'Ono no Komachi. Symbole de l'art et de la séduction, cet aristocrate médiéval est l'auteur de nombreux waka compilés dans de nombreux recueils.

Ainsi, certaines de ses oeuvres seront le point de départ de bon nombre d'épisodes des Contes d'Ise qui prennent comme héros cet artiste légendaire. Mettant en scène une sorte de séducteur que rien n'arrête, ces chapitres sont l'écrin qui met en avant ses poèmes.

Kuniyoshi, provinces célèbres
Comme toujours, le monde de l'estampe utilisera plusieurs épisodes qui mettent en scène la passion et ses dangers comme le montrent ces deux estampes de kuniyoshi et Chikanobu, illustrant le chapitre 12.

Ayant séduit une jeune femme promise à l'empereur, le poète doit l'emmener et fuir pour éviter la colère du souverain. Toutefois, les gardes impériaux rattrapent les fugitifs dans la lande et s'apprêtent à y mettre le feu. C'est alors que la jeune femme compose un poème :

La lande de Musashi
Ne l'incendiez pas aujourd'hui
Mon jeune époux y est caché
Moi-même j'y suis cachée.

Les soldats emmènent les amants en épargnant leur vie.

Le cri d'amour, les brocarts et la nature inscrivent ainsi les amants dans un univers entre rêve et réalité, faisant du poème l'essence de la vie.

samedi 7 septembre 2013

Littérature et estampe 1 Japon amoureux

Ono no Komachi
Kuniyoshi, miroir des femmes
S'il est une femme qui peut incarner la poésie au Japon, on pense aussitôt à Ono no Komachi.
Poétesse du IX° siècle, cette dame de cour a laissé une oeuvre assez importante qui cristallise la parole amoureuse; parole amère ou douloureuse du coeur qui donne lieu au waka et à sa concentration des sentiments.

Triste et solitaire
Je suis une herbe flottante
A la racine coupée
Si un courant m'entraîne
Je crois que je le suivrai.

Si l'Occidental voit dans ces vers une tristesse infinie, c'est surtout une mélancolie douce qui est inscrite au coeur du poème d'Ono no Komachi. C'est peut-être ce sens de la tristesse apaisée qui propulsera la poétesse au rang des Six Poètes Immortels.

Mais il n'y a pas que l'oeuvre qui a fasciné le public, le personnage a donné lieu assez rapidement à une multitude d'histoires où passion et revers de fortune se croisent.
Le Nô ou l'estampe décrivent un personnage envoutant qui s'approche du divin. Ainsi, la Prière à la pluie est un épisode qui met en scène la force de sa poésie lors d'une grande sècheresse qui touche le pays :

Chikanobu, Brocarts de l'Est
 Grâce aux mots, les dieux sont apaisés et la pluie se mettra à tomber.

Au contraire, le mot et la belle apparence peuvent mener à la mort comme le dessinera l'épisode du jeune commandant qui ne pourra répondre aux volontés de l'artiste.

Chikanobu, Lune, neige, fleurs
Figure qui va incarner la cruauté amoureuse, le personnage de Komachi symbolisera l'humain qui doit expier ses fautes et oublier l'orgueil de la beauté et de l'intelligence. 

Yoshitoshi, cent aspects de la lune

C'est pourquoi la fin de Komachi esquissera le portrait d'une vieille femme délaissée qui erre parmi la lande et qui n'est plus que le fantôme de sa splendeur, oubliant même les mots qui firent sa célébrité et qui pourtant effleurent encore des lèvres contemporaines.


mercredi 4 septembre 2013

Lune et estampe Japon amoureux









Les Cent aspects de la lune, Neige, lune et fleurs....A voir le titre des différentes séries en cours au XIX° siècle, on s'aperçoit que l'astre nocturne est un élément primordial dans l'imaginaire nippon.
Ceci n'est d'ailleurs pas propre à cette période; dès les hautes époques, à l'imitation de la culture chinoise, la lune devient un motif symbolique et culturel important.

Sa lumière permet un jeu entre les ombres et la clarté que le soleil ne permet pas. Les estampes jouent ainsi sur les nuances sombres et les blancs profonds afin d'accentuer les contrastes, sorte de mise en scène des notions de yin et yang.

Kunichika, Genji moderne
La promenade nocturne en kimono d'été parait une balade spectrale, sous les auspices d'un astre que les brumes de chaleur  viennent ombrer.

La lune indique ainsi un moment, une heure où les mouvements deviennent prégnants, où humain et étoffes se croisent dans des jeux de cache-cache.

                                                                  Yoshitoshi, Cent aspects de la lune

Que la jeune femme remette son manteau ou que la dame de cour prenne nue un bain de lune, c'est sous cet astre qu'une atmosphère onirique et érotique se met en place. Lumière du théâtre des désirs, la Lune joue avec les passions et les rêveries des hommes.

Cette rêverie devient le créateur de la fiction. Pas étonnant que les poètes et littérateurs soient associés à cet astre. En témoignent les nombreuses estampes qui montrent Murasaki Shikibu, auteur du Genji, en train d'admirer la Lune afin de trouver son inspiration.

Chikanobu, Neige, Lune, Fleurs

Astre du désir, de la création et de la mélancolie, la Lune devient ce créateur d'image et d'imaginaire que le monde de l'estampe multiplie, tendant un miroir onirique au public enchanté par cet univers.

Yoshitoshi, 6 poèmes
C'est ainsi que le portrait d'une artiste célèbre multiplie les représentations lunaires, naturelle et artificielle, dans un jeu de correspondances qui permettent de relier le monde contemporain de la femme avec l'univers poétique et médiéval de l'arrière plan. La troisième face lunaire est peut-être le visage de la dame que cache à peine l'éventail.
L'imaginaire et le réel sont ainsi réenchantés et fusionnent grâce à ce symbole fort de la culture nipponne.

dimanche 1 septembre 2013

La sorcière-chat Japon amoureux


La sorcière d'Okabe
Kunisada, poème et acteur
Près d'un temple vit une sorcière qui se nourrit des jeunes filles qui se trouvent le soir dans les parages du monument.
Ainsi, la vieille femme, un esprit-chat, vampirise l'énergie de ces visiteuses qui ont été oublieuses des interdits.
Esprit maléfique, la sorcière d'Okabe est la réverbération de pulsions et d'énergies qui sont mal utilisées. Prenant comme victimes des éléments féminins, cet esprit répond aux croyances orientales qui veulent que les passions soient plus fortes et destructrices chez la femme que chez l'homme.



Kunisada, détail d'un triptyque
Les représentations hybrides de la sorcière, en même temps qu'elles dévoilent sa vérité, insistent sur le caractère animal que les passions peuvent faire revêtir à l'homme. Les pouvoirs magiques du personnage et sa force dépendent de l'énergie consommée, partant, de la force des passions des victimes.
La sorcière-chat devient le miroir troublé de la passion qui est tendu au public.



Kunichika, 100 rôles de Baiko
Bien souvent, la sorcière est présentée près d'une source lumineuse qui dévoile sa forme véritable et qui insiste sur sa vie nocturne : le chat démon connait sa pleine puissance durant la nuit.

Rôle de kabuki qui fut extrêmement goûté durant la fin du XIXéme, il représente le type-même du rôle spectaculaire qui joue sur le frisson et l'action échevelée qu'appréciaient les spectateurs d'alors.

Morand Hécate et ses chiens Challenge Odyssée grecque 4

Morand  Hécate et ses chiens


La découverte du désir et du plaisir dans les colonies des années 20...
Ajoutez une dose de perversité et vous pourriez obtenir un récit quelque peu lourd en descriptions complaisantes et vulgaires mais c'est sans compter la plume de Morand qui sait inciser dans l'action et faire jouer l'imaginaire grâce aux ellipses et parenthèses.






Tout comme le jeune héros, le lecteur est possédé puis fasciné par Clotilde, Hécate sensuelle, et ses secrets.
Par de courts chapitres (1 à 3 pages), le drame qui se joue devient une mécanique implacable du désir et de la perversité qui ne perd pas son mystère à la fin du texte.

Morand reprend le personnage de la déesse Hécate, divinité triple des carrefours qui est le double crépusculaire de Diane. Noire lune, elle préside à la magie et aux secrets. C'est cette aura de mystère et de perversion que produit Clotilde sur les sens et l'imagination du héros.


C'est une divinité antique masquée qui agit dans ce court roman où les chiens sont remplacés par des enfants, transformant le plaisir en perversité.


" La triple Hécate, reine de la nuit, se nourrit de chiens; pareille à l'affreuse déesse, Clotilde dévore des chiots, ces enfants dont elle fait sa pâture."