vendredi 31 octobre 2014

Expo La disparition des lucioles, Prison Ste Anne, Avignon (84)


A la recherche des lumières...


Partant d'un article de Pasolini écrit quelques semaines avant son assassinat, l'argument de l'exposition met en lumière la question de l'évidement, de la béance d'un lieu et d'une société et de la réponse que l'art peut donner à un tel phénomène. Face à des cellules, des lieux quotidiens vidés de leur fonction mais qui gardent un poids émotif et symbolique fort, quelle vie nouvelle apporter?


 
Recherchant un lieu pouvant accueillir ses collections durant les travaux de la Fondation, Y Lambert s'est tourné vers la prison Ste Anne. Les œuvres présentées ne sont pas seulement des pièces de sa collection mais aussi des œuvres de commande réalisées pour ce lieu particulier.



On retrouve de grands noms anciens ou très actuels : de Basquiat ou Warhol à Yan Pei Ming, l'exposition présente des œuvres de grands noms de la scène artistique. Autre particularité : le grand nombre d'œuvres que l'on peut observer de manières différentes : en restant sur le seuil d'une cellule, en y pénétrant ou encore en la contemplant via le judas de la porte. Pour ma part, mention spéciale pour une installation de Boltansky qui prend toute sa mesure poétique à être observée par un interstice!



Le dialogue entre les œuvres et le vécu des lieux peut parfois être assez poignant : on ne peut qu'être interpelés par ces murs qui semblent habités d'échos et que certains tableaux ou installations mettent en lumière.


Des lucioles à chasser jusqu'au 25 novembre :
http://www.collectionlambert.fr/evenement/151/la-disparition-des-lucioles.html

jeudi 30 octobre 2014

Poésie et illustration 5 : Les voiles de Lamartine

En plein vent...





Alors que le Mistral a soufflé fort ces derniers temps, un petit détour par la poésie romantique. Le mythe de la mer tempétueuse est primordial pour la première génération de ce mouvement : aspiration à un renouveau politique et intellectuel qui fut en partie incarné par les Amériques de l'après révolution...Mais aussi une source d'amertume pour les hommes mûrs que seront devenus la plupart de ces poètes; un seul refuge : la mémoire et l'imagination!

Une nouvelle poésie illustrée par G Lemercier avec un héros juvénile dynamique et des voiles de navires prophétiques...



Quand j'étais jeune et fier et que j'ouvrais mes ailes,
Les ailes de mon âme à tous les vents des mers,
Les voiles emportaient ma pensée avec elles,
Et mes rêves flottaient sur tous les flots amers.

Je voyais dans ce vague où l'horizon se noie
Surgir tout verdoyants de pampre et de jasmin
Des continents de vie et des îles de joie
Où la gloire et l'amour m'appelaient de la main.

J'enviais chaque nef qui blanchissait l'écume,
Heureuse d'aspirer au rivage inconnu,
Et maintenant, assis au bord du cap qui fume,
J'ai traversé ces flots et j'en suis revenu.

Et j'aime encor ces mers autrefois tant aimées,
Non plus comme le champ de mes rêves chéris,
Mais comme un champ de mort où mes ailes semées
De moi-même partout me montrent les débris.

Cet écueil me brisa, ce bord surgit funeste,
Ma fortune sombra dans ce calme trompeur ;
La foudre ici sur moi tomba de l'arc céleste
Et chacun de ces flots roule un peu de mon cœur.

mardi 28 octobre 2014

Expo Sous le regard de Neptune, Musée archéologique, Nîmes (30)



Neptune sorti des décombres...




Après les travaux de l'avenue J Jaurès à Nîmes et de nombreuses découvertes antiques liées à ce quartier, le musée archéologique, avant de se muer en musée moderne, propose la découverte d'une fontaine d'un bassin d'une riche demeure de la ville.

Le cadre décoratif avec peintures murales, objets usuels et bel autel dégage un contexte archéologique riche. De beaux fragments de verre nous font rêver à des verrières antiques autour de l'installation, témoins d'une richesse et d'un art de vivre qui n'ont rien à envier à notre siècle.






La finesse des détails, malgré les millénaires d'oubli, témoignent d'une haute technologie et d'un goût sûr des propriétaires de cette riche demeure nîmoise, mêlant influence romaine aux racines gauloises perceptibles dans les bronzes et les sculptures mettant en scène Sucellus/Silvain.








La statue d'un bassin représentant Neptune est mise à l'honneur : riche de par ses détails et la finesse d'exécution, cet objet a aussi intéressé les archéologues de par les traces de polychromie (bleu et rouge essentiellement) qui ont été retrouvées. Encore un indice qui permet de lutter contre cette idée trop classique d'une Antiquité immaculée. De nombreuses bornes interactives permettent de se rendre compte du travail d'assemblage ainsi que de la réalité du bassin et de son environnement.
En effet, l'exposition s'attache aussi à rendre hommage aux travaux des archéologues et aux démarches nécessaires à la compréhension d'un objet ainsi que de sa restitution.


La finesse d'exécution et de restauration sont au rendez-vous de même que des détails marins comme la proue d'un navire qui viennent donner un aspect à la fois caractéristique mais aussi plus quotidien de l'utilisation mythologique dans la vie urbaine des provinces romaines.







Une statue à découvrir jusqu'au 9 novembre :
http://www.inrap.fr/archeologie-preventive/Actualites/Agenda/Exposition/p-18395-Sous-le-regard-de-Neptune.htm

dimanche 26 octobre 2014

Expo Midi antique, Musée de l'Arles antique, Arles (13)



Mémoire photographique...


La photographie, dès ses premières années, va se lier aux sites antiques pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les premiers photographes vont vouloir montrer la légitimité de cette dernière et donc, la référence au site antique permettra de donner du poids à ces images d'un nouveau genre.



De plus, la pratique photo va très vite s'allier au travail archéologique pour plusieurs raisons : il permet un état des lieux considéré comme objectif dans cette époque de la fin du XIX° où de nombreux sites sont en cours de classement. De plus, la photo permet une diffusion de l'image du site à travers les instances de la société puis à travers la carte postale touristique.



C'est donc en suivant ces diverses pratiques et les premiers ateliers photo du Sud de la France que l'exposition se développe. On s'étonne d'ailleurs que ces travaux autour des monuments de la Provence (Orange, La Turbie, Glanum...) n'aient pas encore été bien montrés au public : hors les monuments italiens, la photographie n'a guère eu de presse. Une centaine de clichés est ainsi exposée, datant des années 1850 au début du XX° siècle.



Des images en noir et blanc à voir jusqu'au 14 décembre :

http://www.arles-antique.cg13.fr/mdaa_cg13/r05_expos/050301.htm

samedi 25 octobre 2014

Challenge Ecrivains japonais d'hier et d'aujourd'hui 2, Kawabata, Le lac


Miroir du désir...



Œuvre de 1955, le Lac est l'un des derniers romans du maitre nippon. Gimpei, vieil homme étrange, cherche à dissimuler certains objets : comme de coutume, il suivait une jeune femme mais celle qu'il venait de croiser avait pris peur et lui avait donné un coup de sac! Le récupérant, il se rend compte que ce dernier comporte 200 000 yens...Cette méprise va donner lieu au croisement des destinées de Gimpei et de Miyako, femme entretenue par le vieil Arita.
Comme dans de nombreux romans de Kawabata, le désir de l'homme déclinant est mis en scène. Il s'agit bien souvent d'un désir trouble qui remonte à un traumatisme enfantin : ce sera le cas pour Gimpei et son amour frustré pour sa cousine ainsi que d'Arita privé de l'amour maternel dans ses jeunes années.





Le désir est ainsi décuplé par le nombre de personnages rencontrés, jeunes comme vieux, ainsi que par son apparition et son développement autour de milieux aquatiques, véritables miroirs des sentiments humains qui semblent se refléter sur des eaux apparemment calmes.




Vision des cerisiers en fleurs, chasse aux lucioles, c'est tout un quotidien à la fois moderne et classique qui se déroule au fil des pages. La facture du récit, elle aussi, repose sur ce mélange particulier à Kawabata : entre trivialité et poésie, humour et tragédie. Le héros aux pieds de singe incarne parfaitement les personnages masculins de l'écrivain qui sont en perpétuelle quête de beauté tout en commettant erreurs et méfaits. Une note subtile et une alliance de contraires qui couronne remarquablement la carrière romanesque de Kawabata.









vendredi 24 octobre 2014

Expo J.M Othoniel, Hôtel-Dieu, le Puy en velay (43)



De verre et de passion...



En écho à la commande d'une sculpture Le cœur de l'Hôtel-Dieu, Othoniel propose un large éventail de son travail, mettant en lumière les liens qu'il a tissés avec le sacré depuis plus de vingt ans dans son œuvre.





L'imaginaire sacré permet le jeu entre les objets de piété (bannières, reliques, statues...) et le langage moderne des verres, des impressions. Une certaine monumentalité et aussi à l'oeuvre; normal pour des objets qui ont tissé des liens étroits avec le religieux et son aspect imposant.






La religiosité n'est pas un simple trait stylistique chez Othoniel. Elle participe de son intimité et a joué un rôle non négligeable dans sa vie privée et sentimentale. De là cette dimension à la fois extrêmement doloriste et solaire : la foi est un chemin bigarré qui éclaire et plonge dans des abîmes de doute.
Ce travail du contraste se retrouve aussi dans l'utilisation de matériaux divers : pierre, verre, papier ou soufre témoignent de cette même recherche de la sublimation du corps pour rejoindre l'esprit. Cette élévation est aussi intensément joyeuse et le kaléidoscope de couleurs et de formes mis en scène dans cette exposition permet au public d'approcher la joie que peut procurer le travail de la matière lumineuses.






mercredi 22 octobre 2014

Poésie et illustration 4 : Il n'y a pas d'amour heureux d'Aragon





La poursuite du bonheur...


Quatrième poème illustré par G Lemercier avec cette pièce issue de la Diane française qui allie amour de la femme et amour de la France alors occupée...Un très beau texte qui fait jouer sensibilité moderne et formes classiques, hommage d'Aragon à la grande lyrique française :







Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force
Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix
Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
          Il n'y a pas d'amour heureux
Sa vie Elle ressemble à ces soldats sans armes
Qu'on avait habillés pour un autre destin
A quoi peut leur servir de se lever matin
Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains
Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes
          Il n'y a pas d'amour heureux

Mon bel amour mon cher amour ma déchirure
Je te porte dans moi comme un oiseau blessé
Et ceux-là sans savoir nous regardent passer
Répétant après moi les mots que j'ai tressés
Et qui pour tes grands yeux tout aussitôt moururent
          Il n'y a pas d'amour heureux
Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard
Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unisson
Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson
Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson
Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare
          Il n'y a pas d'amour heureux
Il n'y a pas d'amour qui ne soit à douleur
Il n'y a pas d'amour dont on ne soit meurtri
Il n'y a pas d'amour dont on ne soit flétri
Et pas plus que de toi l'amour de la patrie
Il n'y a pas d'amour qui ne vive de pleurs
          Il n'y a pas d'amour heureux
          Mais c'est notre amour à tous les deux


N'oublions pas les mises en musique qui viennent rehausser les mots du poète :










mardi 21 octobre 2014

Expo “Utagawa Kunisada: 150th Anniversary of His Death”, musée Ota, Tokyo (Japon)



Un maitre...





Le musée Ota célèbre les 150 ans de la mort d'un des plus grands représentants de l'ukiyoe : Kunisada ou Toyokuni III. Aujourd'hui bien moins connu qu'Hiroshige ou Hokusai, cet artiste n'en demeure pas moins le représentant le plus prolifique de l'école Utagawa : on compte plus de 60000 références de ses œuvres!








Né au XVIII°, Kunisada mourra en 1864, à l'aube de l'ouverture du Japon. dernier grand artiste de l'époque Edo, son style sera en perpétuelle quête de l'esprit du temps. Fortement influencé par Utamaro à ses début, il sera l'un de ceux qui travailleront à une modernisation du style et à une utilisation plus variée des couleurs.






Chantre des Beautés et des acteurs kabuki, Kunisada influencera durablement le monde de l'estampe et deviendra le principal phare stylistique des derniers maitres Ukiyoe tels kunichika ou Yoshitoshi.






Représentant d'un monde coloré et vivant, Kunisada saura imprimer son style tout en demeurant fidèle à l'esprit du Monde flottant. En témoigne sa dernière série les fleurs d'Edo où la collaboration avec d'autres artistes dépeint un monde tokyoite bigarré et contrasté qui met en scène les passions des êtres humains.



Une exposition en deux volets jusqu'au 25 novembre 2014 : http://www.ukiyoe-ota-muse.jp/H261011kunisada-E.html















samedi 11 octobre 2014

Les feux de l'automne


Feux de la nature...


Soir d'automne -
il est un bonheur aussi
dans la solitude
Buson


Méditer à la fenêtre entre la pluie et une lumière qui dore les dernières fleurs...

mercredi 8 octobre 2014

Poésie et illustration 3 : Une sainte de Verlaine

Auréole de tour...

Troisième oeuvre illustrée : "Une sainte..." de Verlaine. Pièce-phare de La bonne chanson, ce poème tisse l'imaginaire du nom cher au poète qui sera plus tard développé par Proust dans les premiers volumes de la Recherche.


Une Sainte en son auréole,
Une Châtelaine en sa tour,
Tout ce que contient la parole
Humaine de grâce et d'amour ;

La note d'or que fait entendre
Un cor dans le lointain des bois,
Mariée à la fierté tendre
Des nobles Dames d'autrefois ;

Avec cela le charme insigne
D'un frais sourire triomphant
Eclos dans des candeurs de cygne
Et des rougeurs de femme-enfant ;

Des Aspects nacrés, blancs et roses,
Un doux accord patricien :
Je vois, j'entends toutes ces choses
Dans son nom Carlovingien.

mardi 7 octobre 2014

Exposition "Le clavecin, redécouverte d'un chef-d'oeuvre", Musée d'Art et d'Industrie, St Etienne (42)

Adoucir les moeurs...



Le Musée d'art et d'industrie présente un objet assez singulier dans ses collections : un clavecin remarquable à plus d'un titre. Tout d'abord parce qu'il s'agit d'un des rares instruments remaniés qui existent dans les collections publiques. Construit au XVII°, son mécanisme fut remis au goût du jour un siècle suivant. Ensuite, c'est son décor de chinoiseries en laque qui demeure exceptionnel et enfin le piètement de style Régence qui lui est associé puisque ce type de mobilier a pratiquement disparu pour les pièces connues.


L'exposition joue ainsi sur le problème de la restauration à travers le prisme du mécanisme mais aussi de la laque qui fut une spécialité parisienne dès le XVII° siècle. Des bornes interactives et plusieurs films permettent de mieux comprendre les techniques de l'époque ainsi que les difficultés qui se posent à un restaurateur de nos jours.


Enfin, des objets décoratifs ainsi qu'une harpe du XVIII° siècle témoignent de la maitrise et du goût de ce siècle pour les décors exotiques inspirés de la Chine et du Japon, lieux de l'imaginaire qui permettaient aux goûts baroques de se déchainer.

A voir et écouter jusqu'au 5 janvier 2015 :

http://www.musee-art-industrie.saint-etienne.fr/expositions-evenements/exposition-en-cours/exposition-clavecin-redecouverte-dun-chef-doeuvre


dimanche 5 octobre 2014

Expo Le jardin des tarots, Palais Idéal du facteur Cheval, Hauterives (26)


Monstres, jardins et compagnie...


Le palais idéal accueille des photographies, dessins et projets qui font découvrir le Jardin des tarots de Niki de Saint Phalle. L'artiste des Nanas et autres sculptures colorés, emblèmes des années 70 reconnait très tôt son admiration et sa dette envers le rêveur d'Hauterives.



Le mélange des forces telluriques et érotiques apparait à travers tous les supports qui sont présentés dans les salles et autour du palais. La joie de vivre et une aspiration à une forme universelle apparaissent dans ces oeuvres.


Ainsi, le monde du tarot, symbole d'un dictionnaire ésotérique qui tente de décrypter le réel à travers les images se transforme en un univers énergique qui télescope les représentations et les couleurs. Saint Phalle se joue des codes ésotériques pour fonder ses propres termes symboliques, à la manière du facteur qui dénote la plupart des univers culturels et religieux dans le but de transcrire une mythologie personnelle qui permet la liberté de l'imaginaire.


Une mythologie de la liberté à rencontrer jusqu'au 5 janvier 2015 :

http://www.nikidesaintphalle.com/frenchFrameset.html